Venant du jardin des Tuileries, l'accès au Louvre peut se faire en empruntant un large escalier situé un peu avant et à droite du Carrousel. C'est le cheminement que je prends le mercredi 22 mai. Lorsque je rejoins la "salle de la pyramide inversée", où se trouve le poste de contrôle des visiteurs, effarée, je découvre que la file d'attente s'étire sur toute la longueur des boutiques, disparaît dans un angle près des escaliers débouchant rue de Rivoli, et ne cesse de grossir : jusqu'où va-t-elle aller ? Il est dix heures trente. Je sors du Louvre et je gagne le passage Richelieu : ô miracle ! Là, pas de bousculade, avec ma "carte pass" je suis en un instant sous la grande pyramide. L'exposition "Giotto e compagni" se tient dans la Salle de la Chapelle au premier étage de l'aile Sully. La pénibilité des longs escaliers qui y conduisent vont peut être dissuader grand nombre de visiteurs. Et bien non ! Dans cette salle aux dimensions réduites énormément de monde. Les tableaux sont vus à distance. Peu d'œuvres de Giotto lui-même dont deux habituellement accrochées au Louvre : "Saint François recevant les stigmates" (peint pour la cathédrale de Pise - 1265 env.) et, installée comme un calvaire au centre de la salle, "La croix peinte".
Je m'attarde sur quatre très belles toiles de Giotto assez grandes pour être visibles de loin :
Saint Etienne - vers 1320-1325 - bois 84x54cm - Florence
Saint Laurent - vers 1320 - bois - Abbaye de Chaalis
La Vierge à l'Enfant - vers 1320 - bois - Washington
Dieu le Père - chapelle Scrovegni à Padoue - Musei civici
Il fait une chaleur épouvantable, au bord du malaise je quitte la salle. Sous la grande pyramide c'est effroyable : partent à l'assaut des accès aux diverses ailes, un flot de groupes menés bon train par des guides, parapluies dressés à bout de bras. Qu'est devenu mon cher Louvre, celui où j'entrais par le rez-de-chaussée de l'aile Denon, sans file d'attente, sans audio guide, sans une foule de touristes ? Mais ne soyons pas nostalgiques, j'ai pour me consoler la belle pyramide de Ming Pei, et revenons à Giotto.
Il est né à Vespignano di Mugello (province de Florence. Son père se nomme Bondone. Sa date de naissance est située en 1257. Sa date de mort est en revanche connue : 8 janvier 1337. Vasari s'est fait l'écho du récit légendaire qui courait et raconte que Bondone avait confié à Giotto, qui avait dix ans, la garde des moutons. Cimabue (1240-1302) se rendant à Vespignano pour affaire trouva Giotto dessinant un mouton avec une pierre pointue sur une dalle plate et polie. S'arrêtant émerveillé il lui aurait demandé de rejoindre son atelier.
Il est donc probable que Giotto ait été formé dans l'atelier de Cimabue au début des années 1280. Son talent artistique s'est révélé avant tout dans ses grands cycles de fresques. Son sens de la composition dans les scènes religieuses et de la tridimensionnalité font de lui le précurseur de la Renaissance.
Dès 1290 Giotto possède un grand atelier et s'entoure de nombreux assistants chargés d'exécuter ses modèles et de copier ses dessins ; l'attribution des oeuvres entre Giotto et ses collaborateurs est de sorte très délicate.
1288-1292 - premières peintures de Giotto dans l'église supérieure de la Basilique San Francesco à Assise
Isaac repousse Esaü
Sermon aux oiseaux
Lamentation des clarisses
1303-1305 - les fresques de la chapelle Scrovegni de Padoue
crucifixion - détail -
Enrico Scrovegni offrant la maquette de la chapelle
La déposition de croix
1311 - Giotto s'installe à Florence, il réalise une de ses plus admirables oeuvres : "la vierge en majesté" aujourd'hui aux Offices mais provenant de l'Eglise Ognissanti
détail
Fresques de Santa Croce à Florence - Chapelle Peruzzi
Les commanditaires pour la décoration de cette église appartiennent à quelques unes des familles les plus riches et les plus puissantes de la nouvelle bourgeoisie commerçante et bancaire de FLorence.
1315 et 1318 - décoration de la Chapelle de la Madeleine à Assise
Ce sont les franciscains qui ont ranimé le culte de Ste Madeleine reconnaissant une sorte de fraternité entre François et Madeleine, il est devenu florissant après l'an mil
Marie Madeleine arrivant à Marseille détail
Marie Madeleine dialoguant avec les anges détail
1320 - 1325 - Les derniers travaux de Giotto à FLorence
- les toiles de l'exposition au Louvre, St Etienne, St Jean, St Laurent, La vierge et l'enfant (images en tête de l'article).
- La Chapelle Bardi de la Basilique Santa Croce de Florence consacrée à St François.
Vérification des stigmates de St François
1328 - Giotto est à Naples au service du Roi Robert d'Anjou et devient "peintre de cour". Les oeuvres exécutées ont presque toutes été perdues.
1334 - De retour à Florence Giotto est nommé "magister et gubernator" de l'oeuvre de Santa Reparata. Il réalise le projet du campanile de la cathédrale devenue Santa Maria del Fiore. Il y fut enterré avec les plus grands honneurs en 1337.
L'exposition dans la Salle de la Chapelle est certainement très intéressante si l'on peut la visiter dans des conditions plus favorables, ce qui me parait difficile compte tenu de sa médiatisation.
Un dernier petit commentaire : dans la fresque du "sermon aux oiseaux" (voir image ci-dessus) un détail m'a fait penser à d'autres oiseaux
ceux de Braque ...
plafond au Louvre